Illustration et quatrième de couverture
La complexité a pour contrepartie le chaos, établissant ainsi un équilibre mouvant qui permet à l'évolution de s'exprimer. La fuite en avant de l'humanité accroît-elle le désordre autour d'elle ? La contraint-elle à opérer des choix, heureux ou malheureux, dont dépend son avenir ?
Saura-t-elle maintenir les plateaux de la balance au même niveau ou bien, par ses excès la fera-t-elle pencher du mauvais côté ? Dans un cas comme dans l'autre, quels seront les défis à relever, les conséquences à assumer ? Qui aura le dernier mot : l'esprit ou L'ENTROPIE ?
Table des matières
Préface de Jean-Michel Archaimbault
Saura-t-elle maintenir les plateaux de la balance au même niveau ou bien, par ses excès la fera-t-elle pencher du mauvais côté ? Dans un cas comme dans l'autre, quels seront les défis à relever, les conséquences à assumer ? Qui aura le dernier mot : l'esprit ou L'ENTROPIE ?
Table des matières
Préface de Jean-Michel Archaimbault
- Après moi le déluge
- Izieu
- L’Antéchrist
- Le temps du rêve
- Les Alyscamps
- Norma
- Entropie
- Un coup de grisou
- Vanité
- Wannsee
- Admira
- Dans la maison du jaguar
- Euryale
- Évolution
1973… ET LA SUITE
Évoquer le titre de cette dystopie corrosive et grinçante signée Richard Bessière (Fleuve Noir Anticipation n°555, avril 1973) n’a rien d’un pur hasard. D’abord, l’année indiquée marque l’entrée d’un jeune homme passionné de science-fiction dans le fanzinat actif et lui offre l’occasion inespérée d’une rencontre déterminante. Ensuite, la référence à l’auteur qui a ouvert le grand bal d’Anticipation en 1951 permet de souligner toute l’importance de cette collection – à l’époque et encore maintenant – pour ledit jeune homme qui se décrit comme « élevé au Fleuve Noir sous la mère ». Bien évidemment, il s’agit de Didier Reboussin, une personnalité dont la richesse, les connaissances, la passion et le talent n’ont d’égales que la discrétion, la gentillesse et le besoin de partager ce qu’il aime. Son parcours personnel, il l’a déjà relaté dans son article Souvenirs faniques paru en 2021 sur le site Le Galion des Etoiles.
Après ses deux romans, « L’arbre aux lunes » (2017) puis « Le chemin de Damas » (2021), parus chez Pulp Factory, voici donc que Didier nous propose « Entropie », qui regroupe dix-neuf nouvelles dont sept inédites…
Ne nous étonnons pas de souvent trouver dans ces textes, à travers l’écriture classique, la sensibilité aiguë et l’imagination si vaste de leur auteur, l’écho de facettes remarquables du talent de ces deux grandes dames que furent Nathalie Henneberg et Julia Verlanger, tout en y percevant aussi l’admiration de Didier pour d’autres maîtres de la science-fiction.
Ainsi, par exemple, Clifford D. Simak dans « La chose qui pensait », avec une dimension supplémentaire d’amour sublime et tragique suscité par des présences enfouies sous la terre depuis les premiers âges du monde. Et plus loin, dans « Évolution », Olaf Stapledon dont le « Créateur d’étoiles » résonne lors de l’éveil à la conscience cosmique du narrateur qui se verra confier le choix du destin de notre espèce.
Dans cette collection de nouvelles, Didier Reboussin nous invite à voyager sur notre planète, à la recherche de l’éternel féminin qui se révèle dans des contrées lointaines, dans des replis du temps, dans d’autres dimensions soudain accessibles par des processus étranges ou miraculeux. Omniprésente, l’Histoire offre ses surprises et ses pièges en diverses époques marquantes, dont l’âge noir de la Seconde Guerre mondiale avec ses criminels encore impunis et ses démons qu’il faut exorciser. À Sarajevo, deux amoureux tragiques trouvent un refuge surréaliste, les mines de charbon du Nord voient apparaître un Messie inattendu et un disciple fauteur de catastrophe, une locomotive à vapeur (rappelons au passage que le monde ferroviaire est l’une des grandes passions de Didier) relie tout-à-coup l’année 1955 aux premiers mois de la Grande Guerre et emmène son « train des fantômes » sur une voie balisée de souvenirs poignants… Nous irons « en Arles, où sont les Alyscamps » (Paul-Jean Toulet), dans un autre Paris, à Milan sur les traces de Maria Callas, à Vaux-le-Vicomte, en Australie, au Mexique… et il ne sera pas toujours aisé d’en revenir.
L’espace, le cosmos s’ouvrent pour la visite à des mondes singuliers, de gadoue et de pétrole où règne la plus sordide cupidité, de fascination et de merveilles comme ce grand arbre qui, sous les rayons de trois soleils, enserre entre ses branches et ses ramures des planètes et des lunes où foisonnent la vie et la conscience. Viennent alors les réflexions et les considérations sur le pouvoir, la durabilité des structures qui le sous-tendent et lui permettent de s’exercer, la vanité et la fragilité de ces édifices que sont les civilisations planétaires ou interstellaires.
En synthèse, la puissance absolue et souveraine peut-elle appartenir à autre force ou principe que l’entropie ? Qu’elle soit terrestre ou galactique, l’Humanité n’est-elle pas vouée qu’à une seule destinée, celle de disparaître pour que soient effacées les traces de son triste passage et qu’une chance de renouveau, de réinitialisation positive, soit offerte à ce qui viendra après ?
Au gré de ces histoires, l’une des constatations les plus frappantes est bien cette perception du caractère nuisible de l’Homme. Quant aux « anges de la colère » qui surgiront ou seront élus pour éradiquer le fléau, ils auront le choix des armes, du grotesque au tragique, du ridicule au métaphysique. Et nous, lecteurs, resterons là, à méditer sur le meilleur ou le pire, au bord d’un abîme de réflexions…
Les derniers mots seront pour illustrer plusieurs convergences personnelles entre Didier et moi-même. Tous deux, nous sommes d’ardents défenseurs du Fleuve Noir Anticipation (et Angoisse, également) qui nous a fait faire nos premiers pas sur les chemins de la science-fiction. Les fréquentes contributions de Didier au fanzine « Météore » de Michel Vannereux et ses « Croisières au long du Fleuve », dans Galaxies, auxquelles il m’associe à l’occasion, en témoignent notamment. En 2011, nous nous sommes retrouvés dans l’anthologie commémorative « Dimension Jimmy Guieu » concoctée par Richard D. Nolane chez Rivière Blanche. Puis Didier a signé la très belle nouvelle « Le destin d’Hermos » dans mon étude et anthologie « Interco, la Galaxie humaine de J. et D. Le May » parue fin 2013 chez le même éditeur. Au même moment, alors que je réfléchissais à la réécriture « modernisée » d’un roman de Richard Bessière (autre que « Les conquérants de l’Univers », demande initiale de Mick Bessière mais véritable mission impossible !), une très pertinente conversation avec Didier lors des regrettées Rencontres de l’Imaginaire de Sèvres m’a conforté dans le choix de « N’accusez pas le ciel »[1], qui est ainsi devenu Katorga et a été publié fin 2014 toujours chez Rivière Blanche. Fin 2021, nous avons tous deux été d’actifs artisans des divers hommages rendus à Richard Bessière à l’occasion des dix ans de sa disparition, renouvelant ainsi le témoignage de notre amitié commune avec Mick et le devoir de mémoire envers feu son époux. Le choix du titre de cette préface en est d’ailleurs une illustration supplémentaire. Enfin, le Ténério mentionné dans « L’arbre aux lunes » est la figure centrale du roman « Les survivants de Kor »[2] signé Peter Randa (de son vrai nom André Duquesne, 1911-1979), le préféré de Didier dans l’œuvre abondante d’un auteur trop vite jugé et étiqueté dont nous sommes parmi les seuls et derniers à militer pour la reconnaissance de certaines qualités remarquables.
Mais ceci est une autre histoire !
Jean-Michel Archaimbault, Hourtin, novembre 2023
Après ses deux romans, « L’arbre aux lunes » (2017) puis « Le chemin de Damas » (2021), parus chez Pulp Factory, voici donc que Didier nous propose « Entropie », qui regroupe dix-neuf nouvelles dont sept inédites…
Ne nous étonnons pas de souvent trouver dans ces textes, à travers l’écriture classique, la sensibilité aiguë et l’imagination si vaste de leur auteur, l’écho de facettes remarquables du talent de ces deux grandes dames que furent Nathalie Henneberg et Julia Verlanger, tout en y percevant aussi l’admiration de Didier pour d’autres maîtres de la science-fiction.
Ainsi, par exemple, Clifford D. Simak dans « La chose qui pensait », avec une dimension supplémentaire d’amour sublime et tragique suscité par des présences enfouies sous la terre depuis les premiers âges du monde. Et plus loin, dans « Évolution », Olaf Stapledon dont le « Créateur d’étoiles » résonne lors de l’éveil à la conscience cosmique du narrateur qui se verra confier le choix du destin de notre espèce.
Dans cette collection de nouvelles, Didier Reboussin nous invite à voyager sur notre planète, à la recherche de l’éternel féminin qui se révèle dans des contrées lointaines, dans des replis du temps, dans d’autres dimensions soudain accessibles par des processus étranges ou miraculeux. Omniprésente, l’Histoire offre ses surprises et ses pièges en diverses époques marquantes, dont l’âge noir de la Seconde Guerre mondiale avec ses criminels encore impunis et ses démons qu’il faut exorciser. À Sarajevo, deux amoureux tragiques trouvent un refuge surréaliste, les mines de charbon du Nord voient apparaître un Messie inattendu et un disciple fauteur de catastrophe, une locomotive à vapeur (rappelons au passage que le monde ferroviaire est l’une des grandes passions de Didier) relie tout-à-coup l’année 1955 aux premiers mois de la Grande Guerre et emmène son « train des fantômes » sur une voie balisée de souvenirs poignants… Nous irons « en Arles, où sont les Alyscamps » (Paul-Jean Toulet), dans un autre Paris, à Milan sur les traces de Maria Callas, à Vaux-le-Vicomte, en Australie, au Mexique… et il ne sera pas toujours aisé d’en revenir.
L’espace, le cosmos s’ouvrent pour la visite à des mondes singuliers, de gadoue et de pétrole où règne la plus sordide cupidité, de fascination et de merveilles comme ce grand arbre qui, sous les rayons de trois soleils, enserre entre ses branches et ses ramures des planètes et des lunes où foisonnent la vie et la conscience. Viennent alors les réflexions et les considérations sur le pouvoir, la durabilité des structures qui le sous-tendent et lui permettent de s’exercer, la vanité et la fragilité de ces édifices que sont les civilisations planétaires ou interstellaires.
En synthèse, la puissance absolue et souveraine peut-elle appartenir à autre force ou principe que l’entropie ? Qu’elle soit terrestre ou galactique, l’Humanité n’est-elle pas vouée qu’à une seule destinée, celle de disparaître pour que soient effacées les traces de son triste passage et qu’une chance de renouveau, de réinitialisation positive, soit offerte à ce qui viendra après ?
Au gré de ces histoires, l’une des constatations les plus frappantes est bien cette perception du caractère nuisible de l’Homme. Quant aux « anges de la colère » qui surgiront ou seront élus pour éradiquer le fléau, ils auront le choix des armes, du grotesque au tragique, du ridicule au métaphysique. Et nous, lecteurs, resterons là, à méditer sur le meilleur ou le pire, au bord d’un abîme de réflexions…
Les derniers mots seront pour illustrer plusieurs convergences personnelles entre Didier et moi-même. Tous deux, nous sommes d’ardents défenseurs du Fleuve Noir Anticipation (et Angoisse, également) qui nous a fait faire nos premiers pas sur les chemins de la science-fiction. Les fréquentes contributions de Didier au fanzine « Météore » de Michel Vannereux et ses « Croisières au long du Fleuve », dans Galaxies, auxquelles il m’associe à l’occasion, en témoignent notamment. En 2011, nous nous sommes retrouvés dans l’anthologie commémorative « Dimension Jimmy Guieu » concoctée par Richard D. Nolane chez Rivière Blanche. Puis Didier a signé la très belle nouvelle « Le destin d’Hermos » dans mon étude et anthologie « Interco, la Galaxie humaine de J. et D. Le May » parue fin 2013 chez le même éditeur. Au même moment, alors que je réfléchissais à la réécriture « modernisée » d’un roman de Richard Bessière (autre que « Les conquérants de l’Univers », demande initiale de Mick Bessière mais véritable mission impossible !), une très pertinente conversation avec Didier lors des regrettées Rencontres de l’Imaginaire de Sèvres m’a conforté dans le choix de « N’accusez pas le ciel »[1], qui est ainsi devenu Katorga et a été publié fin 2014 toujours chez Rivière Blanche. Fin 2021, nous avons tous deux été d’actifs artisans des divers hommages rendus à Richard Bessière à l’occasion des dix ans de sa disparition, renouvelant ainsi le témoignage de notre amitié commune avec Mick et le devoir de mémoire envers feu son époux. Le choix du titre de cette préface en est d’ailleurs une illustration supplémentaire. Enfin, le Ténério mentionné dans « L’arbre aux lunes » est la figure centrale du roman « Les survivants de Kor »[2] signé Peter Randa (de son vrai nom André Duquesne, 1911-1979), le préféré de Didier dans l’œuvre abondante d’un auteur trop vite jugé et étiqueté dont nous sommes parmi les seuls et derniers à militer pour la reconnaissance de certaines qualités remarquables.
Mais ceci est une autre histoire !
Jean-Michel Archaimbault, Hourtin, novembre 2023
Notes :
[1] Fleuve Noir Anticipation n°259, 1964.
[1] Fleuve Noir Anticipation n°259, 1964.
[2] Fleuve Noir Anticipation n°323/H.S.12, 1967.