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Ma premiĂšre plongĂ©e dans les mĂ©andres du fandom SF remonte Ă 1972. Tout commença par une petite annonce dans Fiction. A cette Ă©poque, je ne lisais dĂ©jĂ plus que de la SF, accumulant les « Anticipation » ornĂ©s d'illustrations de Gaston de Sainte-Croix, acquis auprĂšs de bouquinistes sur les marchĂ©s. Un jour, je m'Ă©tais mĂȘme aventurĂ© â toujours Ă la suite de la lecture d'une annonce dans Fiction que j'achetais rĂ©guliĂšrement depuis le n° 221 â Ă la librairie « La mandragore » Ă Paris. J'y trouvais alors d'anciens volumes dits « Ă la fusĂ©e », en particulier des Wul, Ă des prix qui n'avaient par contre plus rien Ă voir avec ceux pratiquĂ©s par mes fournisseurs habituels. Mais bon, la lecture du « Temple du passĂ© » valait bien des sacrifices !
Or donc, passa dans Fiction (ou Galaxie, je ne sais plus) une petite annonce d'amateurs dĂ©sireux de crĂ©er un fanzine et recherchant dans ce but des bonnes volontĂ©s. J'avais dĂ©jĂ franchi Ă moitiĂ© le pas en Ă©crivaillant des petites histoires â dont j'ai perdu aujourd'hui toute trace. Je me souviens en avoir fait parvenir une Ă Gandahar, premier fanzine de ce nom. Elle ne devait pas ĂȘtre terrible car je ne reçus aucune rĂ©ponse de cette Ă©phĂ©mĂšre revue. Je correspondais aussi avec un fan habitant Ă Cherbourg â Jacques Avoine â et nous Ă©changions par courriers interposĂ©s impressions et considĂ©rations sur des livres ou des auteurs de SF. Jacques participa Ă la convention de Grenoble en 1974 et fut probablement le premier lecteur de mes Ă©lucubrations. Il fit partie de l'Ă©quipe de « SpĂ©culation », fanzine auquel je donnai quelques critiques de livres.
Ainsi donc, un beau jour, chevauchant ma Mobylette, je me rendis rue des Petites Ecuries dans le 10Ăšme arrondissement de Paris, Ă la rencontre du petit cercle d'amateurs que j'envisageais d'intĂ©grer. Je pĂ©nĂ©trai dans un immeuble vĂ©tuste donnant sur une vaste cour intĂ©rieure, comportant une synagogue Ă un Ă©tage et l'antre de Jean-Charles Rodriguez au dernier, style chambre de bonne. C'Ă©tait lĂ le quartier gĂ©nĂ©ral des quelques fans rĂ©unis autour de lui. Nous Ă©tions peu nombreux, quatre ou cinq, mais avec des goĂ»ts et des idĂ©es bien diffĂ©rents si ce n'est opposĂ©s, ce qui crĂ©ait de l'ambiance. C'est dans ce petit milieu que je dĂ©couvris la dimension politique qui agitait alors le monde de la SF. Il faut dire que mai 68 Ă©tait encore proche et que, sous Pompidou, la rigueur gaulliste se faisait toujours sentir, mĂȘme si la sociĂ©tĂ© commençait Ă craquer de toutes parts. Cependant j'Ă©tais un pur candide en matiĂšre politique et je ne rĂȘvais que de voyages et d'aventures sidĂ©rales ! Je fis la connaissance de Roland PrĂ©vot qui Ă©tait familier avec les mondes faniques belge et anglo-saxon. Ces derniers Ă©taient infiniment plus mĂątures et organisĂ©s qu'en France. Par consĂ©quent, Roland avait en termes de conception et de contenu d'un fanzine des idĂ©es bien arrĂȘtĂ©es mais pas forcĂ©ment partagĂ©es. En effet les autres membres du groupe, moins influencĂ©s que lui, tiraient un peu dans tous les sens ; ce que je traduis aujourd'hui par l'effervescence de la jeunesse et de ses partis pris hĂątifs. Quoi qu'il en fut, aprĂšs une pĂ©riode assez longue d'Ă©changes, de discussions passionnĂ©es et d'engueulades, nous nous mĂźmes Ă l'ouvrage. Notre fanzine s'appellerait Nadir. Il fallait juste le remplir.
Grùce à Jean-Claude De Repper qui tenait la librairie « Azathot » rue Grégoire de Tours, j'avais accÚs aux adresses de la plupart des auteurs d'alors. Pour la petite histoire, la librairie de JCR (dans laquelle j'ai dépensé une fortune...) était mitoyenne avec l'atelier d'une artiste plasticienne spécialisée dans le travail du métal. Pour cela, elle jouait du poste à souder et les fumées se dispersaient vers la librairie de Jean-Claude, ce qui le faisait fulminer. Donc, muni de bien des coordonnées, je m'empressais de contacter quelques célébrités (oui, naïveté de la jeunesse) pour leur demander de participer gentiment à notre magnifique fanzine. C'est dans ce cadre que j'établis une longue correspondance avec Jean-Pierre Andrevon, qui se concrétisa par la fourniture d'un petit texte de sa part. JPA venait du fanzinat (Lunatique) et était trÚs abordable. (Il l'est toujours...) JPA est quelqu'un envers qui j'éprouve une grande admiration et de la gratitude. Il n'y a là nulle flagornerie de ma part. Je me souviens des multiples courriers que nous échangeùmes avec, sur ses enveloppes, toujours un petit dessin écolo par lequel il dénonçait les essais atomiques à Mururoa. Autre célébrité qui nous accorda une interview : Jean-Claude Forest, qui venait alors de publier les premiÚres aventures d'Hypocrite. Le sommaire commençait à bien se remplir !
Roland Prévot, lui, donnait la derniÚre touche à un article remarquable sur le fandom, « Ramblings », dans lequel il analysait avec pertinence les différences entre ce qui se faisait en France et ailleurs. Disons que chez nous, c'était un peu brouillon. La matiÚre était là et il n'y avait plus qu'à lui donner un support. Je participai en livrant mon tout premier texte, « L'envers de l'univers vu de travers » qui connut une révision 15 ans plus tard dans Phénix et une réécriture totale sous le titre « Les petits métiers du futur : le dépanneur d'électro-ménager » pour Géante Rouge. Je me souviens, non sans une petite pointe d'orgueil, du commentaire positif que m'en fit JPA à sa lecture.
Aujourd'hui, à l'heure du traitement de texte et de l'impression laser, la confection d'un fanzine relÚve de la rigolade. A l'époque, on pouvait parler des travaux d'Hercule. Qui n'a pas connu les stencils et les ronéos ne sait rien de l'abnégation nécessaire pour fabriquer une petite revue tirée à 200 exemplaires. Frappe des stencils la nuit, achat des rames de papier, recherche de la ronéo, tirage, séchage, reliure, recherche d'un imprimeur offset pour la couverture... Autant d'épreuves à surmonter pour le pauvre fanzineur. Mais, un beau jour de 1973, nous tßnmes enfin en main le fruit de ce dur labeur !
AprĂšs le n° 1, nous dĂ©cidĂąmes de remettre le couvert sans nous douter bien sĂ»r que ce second numĂ©ro serait le dernier. Fort du carnet d'adresses fourni par JC de Repper, je contactai et rencontrai Pierre Barbet afin de l'interviewer. Pierre Barbet â de son vrai nom Claude Avice â avait publiĂ© quelques mois auparavant « L'empire du Baphomet » qui avait Ă©tĂ© louĂ© par la critique, d'habitude mĂ©prisante envers les productions du Fleuve Noir. Claude Ă©tait un homme adorable, d'une gentillesse infinie et je garde de chacune de nos rencontres un souvenir Ă©mu. Cette interview â la seule Ă priori qu'il ait jamais donnĂ©e - a Ă©tĂ© mise en ligne sur internet par Charles Moreau et est donc toujours disponible. Dans ce second numĂ©ro, je rĂ©cidivai en Ă©crivant un nouveau texte, trĂšs inspirĂ© par R F Young, « Du pays de moi-mĂȘme ». Encore une fois, remaniĂ©, celui-ci connut une autre vie des dĂ©cennies plus tard chez Arkuiris, sous le titre « Admira ». La fabrication de ce second numĂ©ro de Nadir avait Ă©tĂ© cocasse. Le seul papier sur lequel nous avions pu mettre la main Ă©tait de couleur saumon, et la seule ronĂ©o disponible appartenait au curĂ© de la ville de Santeny, un ami de ma belle-soeur. Cet homme d'Ă©glise - qui avait une copine - Ă©tait d'esprit plutĂŽt ouvert ! Enfin nous procĂ©dĂąmes Ă la reliure des exemplaires dans les locaux d'un syndicat d'extrĂȘme-gauche oĂč rĂ©gnait une toute autre ambiance !
Autre personnage dont je fis par la suite la connaissance : Maurice Limat. A l'Ă©poque, peu de foyers possĂ©daient le tĂ©lĂ©phone, et je l'avais appelĂ© sur un coup de tĂȘte Ă partir d'une cabine Ă la Poste. Je me souviens d'un long Ă©change qui se solda par une invitation Ă lui rendre visite. Il habitait Ă cĂŽtĂ© de la Place de la RĂ©publique dans un appartement cossu. C'Ă©tait un homme sympathique et raffinĂ©. Il avait fait relier tous ses ouvrages qui s'alignaient ainsi dans sa bibliothĂšque en impressionnantes rangĂ©es. Avec son gendre ou son fils (je n'ai jamais su exactement) il avait organisĂ© Ă SĂšvres une petite manifestation consacrĂ©e Ă la SF et Ă l'Ă©sotĂ©risme. J'en conserve un souvenir marquant : on s'Ă©tait donnĂ© rendez-vous chez lui et je devais le suivre jusqu'Ă SĂšvres. Avec mon insĂ©parable mobylette je faisais en sorte de ne pas perdre de vue l'ami6 dans laquelle lui et son fils (ou gendre) Ă©taient installĂ©s. Ah folle jeunesse !
Cependant ce petit salon allait me permettre de rencontrer une lĂ©gende de l'illustration - RenĂ© Brantonne â et deux auteurs que j'apprĂ©ciais particuliĂšrement : J et D Le May. Brantonne je ne l'ai jamais revu, par contre je suis allĂ© quelques fois chez les Cauderon (J et D Le May) qui habitaient un petit immeuble moderne Ă cĂŽtĂ© de la Porte DorĂ©e. Il est probable â mais ce n'est pas une certitude, la mĂ©moire me fuit â que c'est moi qui demandais Ă Jean un texte pour Horizons du Fantastique, revue Ă laquelle je collaborais. Il s'agit de « Contrebande » repris par JM Archaimbault dans son ouvrage sur Interco. Ainsi donc, petit Ă petit, mes connaissances dans le monde de la SF s'enrichissaient de nouveaux personnages. L'un d'eux Ă©tait Jacqueline Osterrath. A l'origine j'avais interviewĂ© Jacqueline pour Nadir, mais une de ses dĂ©clarations avait mis en rogne une partie de l'Ă©quipe et compromis sa publication. Elle y dĂ©clarait en effet que « La BD Ă©tait une littĂ©rature pour analphabĂštes ». C'Ă©tait du Jacqueline tout crachĂ©. Elle m'ouvrit nĂ©anmoins les pages de son illustre fanzine « Lunatique » pour quelques critiques. Dommage que cet entretien ait Ă©tĂ© perdu, on n'en connait aucun autre de cette grande dame. Il faut dire, pour la petite histoire, que Jacqueline habitait ordinairement en Allemagne. Elle avait traduit les aventures de Perry Rhodan en France. Lorsqu'elle venait Ă Paris elle descendait chez sa mĂšre, rue Edmond Roger dans le 15Ăšme arrondissement et lĂ , coĂŻncidence, c'est moi qui entretenait son ascenseur...
Donc, aprÚs Nadir commença pour moi l'expérience « Axolotl », qui connut un numéro 0 et un numéro 1. Je fis aussi un autre essai avec « Kroofan », dont seule parut une unique livraison. Là encore, dans ce dernier fanzine, j'ambitionnais de publier en épisodes un roman de mon crû, roman dont j'avais envoyé l'unique exemplaire chez Opta. Je pense que le pauvre lecteur d'alors a dû bénir la poubelle de son bureau... Quoi qu'il en soit, recyclage oblige, la portion de roman ainsi sauvée et durement retraitée fut publiée, longtemps aprÚs, dans l'anthologie consacrée à Jimmy Guieu par Richard Nolane, sous forme d'une nouvelle intitulée « Cité Noé 51 ».
đ Ă suivre...
Or donc, passa dans Fiction (ou Galaxie, je ne sais plus) une petite annonce d'amateurs dĂ©sireux de crĂ©er un fanzine et recherchant dans ce but des bonnes volontĂ©s. J'avais dĂ©jĂ franchi Ă moitiĂ© le pas en Ă©crivaillant des petites histoires â dont j'ai perdu aujourd'hui toute trace. Je me souviens en avoir fait parvenir une Ă Gandahar, premier fanzine de ce nom. Elle ne devait pas ĂȘtre terrible car je ne reçus aucune rĂ©ponse de cette Ă©phĂ©mĂšre revue. Je correspondais aussi avec un fan habitant Ă Cherbourg â Jacques Avoine â et nous Ă©changions par courriers interposĂ©s impressions et considĂ©rations sur des livres ou des auteurs de SF. Jacques participa Ă la convention de Grenoble en 1974 et fut probablement le premier lecteur de mes Ă©lucubrations. Il fit partie de l'Ă©quipe de « SpĂ©culation », fanzine auquel je donnai quelques critiques de livres.
Ainsi donc, un beau jour, chevauchant ma Mobylette, je me rendis rue des Petites Ecuries dans le 10Ăšme arrondissement de Paris, Ă la rencontre du petit cercle d'amateurs que j'envisageais d'intĂ©grer. Je pĂ©nĂ©trai dans un immeuble vĂ©tuste donnant sur une vaste cour intĂ©rieure, comportant une synagogue Ă un Ă©tage et l'antre de Jean-Charles Rodriguez au dernier, style chambre de bonne. C'Ă©tait lĂ le quartier gĂ©nĂ©ral des quelques fans rĂ©unis autour de lui. Nous Ă©tions peu nombreux, quatre ou cinq, mais avec des goĂ»ts et des idĂ©es bien diffĂ©rents si ce n'est opposĂ©s, ce qui crĂ©ait de l'ambiance. C'est dans ce petit milieu que je dĂ©couvris la dimension politique qui agitait alors le monde de la SF. Il faut dire que mai 68 Ă©tait encore proche et que, sous Pompidou, la rigueur gaulliste se faisait toujours sentir, mĂȘme si la sociĂ©tĂ© commençait Ă craquer de toutes parts. Cependant j'Ă©tais un pur candide en matiĂšre politique et je ne rĂȘvais que de voyages et d'aventures sidĂ©rales ! Je fis la connaissance de Roland PrĂ©vot qui Ă©tait familier avec les mondes faniques belge et anglo-saxon. Ces derniers Ă©taient infiniment plus mĂątures et organisĂ©s qu'en France. Par consĂ©quent, Roland avait en termes de conception et de contenu d'un fanzine des idĂ©es bien arrĂȘtĂ©es mais pas forcĂ©ment partagĂ©es. En effet les autres membres du groupe, moins influencĂ©s que lui, tiraient un peu dans tous les sens ; ce que je traduis aujourd'hui par l'effervescence de la jeunesse et de ses partis pris hĂątifs. Quoi qu'il en fut, aprĂšs une pĂ©riode assez longue d'Ă©changes, de discussions passionnĂ©es et d'engueulades, nous nous mĂźmes Ă l'ouvrage. Notre fanzine s'appellerait Nadir. Il fallait juste le remplir.
Grùce à Jean-Claude De Repper qui tenait la librairie « Azathot » rue Grégoire de Tours, j'avais accÚs aux adresses de la plupart des auteurs d'alors. Pour la petite histoire, la librairie de JCR (dans laquelle j'ai dépensé une fortune...) était mitoyenne avec l'atelier d'une artiste plasticienne spécialisée dans le travail du métal. Pour cela, elle jouait du poste à souder et les fumées se dispersaient vers la librairie de Jean-Claude, ce qui le faisait fulminer. Donc, muni de bien des coordonnées, je m'empressais de contacter quelques célébrités (oui, naïveté de la jeunesse) pour leur demander de participer gentiment à notre magnifique fanzine. C'est dans ce cadre que j'établis une longue correspondance avec Jean-Pierre Andrevon, qui se concrétisa par la fourniture d'un petit texte de sa part. JPA venait du fanzinat (Lunatique) et était trÚs abordable. (Il l'est toujours...) JPA est quelqu'un envers qui j'éprouve une grande admiration et de la gratitude. Il n'y a là nulle flagornerie de ma part. Je me souviens des multiples courriers que nous échangeùmes avec, sur ses enveloppes, toujours un petit dessin écolo par lequel il dénonçait les essais atomiques à Mururoa. Autre célébrité qui nous accorda une interview : Jean-Claude Forest, qui venait alors de publier les premiÚres aventures d'Hypocrite. Le sommaire commençait à bien se remplir !
Roland Prévot, lui, donnait la derniÚre touche à un article remarquable sur le fandom, « Ramblings », dans lequel il analysait avec pertinence les différences entre ce qui se faisait en France et ailleurs. Disons que chez nous, c'était un peu brouillon. La matiÚre était là et il n'y avait plus qu'à lui donner un support. Je participai en livrant mon tout premier texte, « L'envers de l'univers vu de travers » qui connut une révision 15 ans plus tard dans Phénix et une réécriture totale sous le titre « Les petits métiers du futur : le dépanneur d'électro-ménager » pour Géante Rouge. Je me souviens, non sans une petite pointe d'orgueil, du commentaire positif que m'en fit JPA à sa lecture.
Aujourd'hui, à l'heure du traitement de texte et de l'impression laser, la confection d'un fanzine relÚve de la rigolade. A l'époque, on pouvait parler des travaux d'Hercule. Qui n'a pas connu les stencils et les ronéos ne sait rien de l'abnégation nécessaire pour fabriquer une petite revue tirée à 200 exemplaires. Frappe des stencils la nuit, achat des rames de papier, recherche de la ronéo, tirage, séchage, reliure, recherche d'un imprimeur offset pour la couverture... Autant d'épreuves à surmonter pour le pauvre fanzineur. Mais, un beau jour de 1973, nous tßnmes enfin en main le fruit de ce dur labeur !
AprĂšs le n° 1, nous dĂ©cidĂąmes de remettre le couvert sans nous douter bien sĂ»r que ce second numĂ©ro serait le dernier. Fort du carnet d'adresses fourni par JC de Repper, je contactai et rencontrai Pierre Barbet afin de l'interviewer. Pierre Barbet â de son vrai nom Claude Avice â avait publiĂ© quelques mois auparavant « L'empire du Baphomet » qui avait Ă©tĂ© louĂ© par la critique, d'habitude mĂ©prisante envers les productions du Fleuve Noir. Claude Ă©tait un homme adorable, d'une gentillesse infinie et je garde de chacune de nos rencontres un souvenir Ă©mu. Cette interview â la seule Ă priori qu'il ait jamais donnĂ©e - a Ă©tĂ© mise en ligne sur internet par Charles Moreau et est donc toujours disponible. Dans ce second numĂ©ro, je rĂ©cidivai en Ă©crivant un nouveau texte, trĂšs inspirĂ© par R F Young, « Du pays de moi-mĂȘme ». Encore une fois, remaniĂ©, celui-ci connut une autre vie des dĂ©cennies plus tard chez Arkuiris, sous le titre « Admira ». La fabrication de ce second numĂ©ro de Nadir avait Ă©tĂ© cocasse. Le seul papier sur lequel nous avions pu mettre la main Ă©tait de couleur saumon, et la seule ronĂ©o disponible appartenait au curĂ© de la ville de Santeny, un ami de ma belle-soeur. Cet homme d'Ă©glise - qui avait une copine - Ă©tait d'esprit plutĂŽt ouvert ! Enfin nous procĂ©dĂąmes Ă la reliure des exemplaires dans les locaux d'un syndicat d'extrĂȘme-gauche oĂč rĂ©gnait une toute autre ambiance !
Autre personnage dont je fis par la suite la connaissance : Maurice Limat. A l'Ă©poque, peu de foyers possĂ©daient le tĂ©lĂ©phone, et je l'avais appelĂ© sur un coup de tĂȘte Ă partir d'une cabine Ă la Poste. Je me souviens d'un long Ă©change qui se solda par une invitation Ă lui rendre visite. Il habitait Ă cĂŽtĂ© de la Place de la RĂ©publique dans un appartement cossu. C'Ă©tait un homme sympathique et raffinĂ©. Il avait fait relier tous ses ouvrages qui s'alignaient ainsi dans sa bibliothĂšque en impressionnantes rangĂ©es. Avec son gendre ou son fils (je n'ai jamais su exactement) il avait organisĂ© Ă SĂšvres une petite manifestation consacrĂ©e Ă la SF et Ă l'Ă©sotĂ©risme. J'en conserve un souvenir marquant : on s'Ă©tait donnĂ© rendez-vous chez lui et je devais le suivre jusqu'Ă SĂšvres. Avec mon insĂ©parable mobylette je faisais en sorte de ne pas perdre de vue l'ami6 dans laquelle lui et son fils (ou gendre) Ă©taient installĂ©s. Ah folle jeunesse !
Cependant ce petit salon allait me permettre de rencontrer une lĂ©gende de l'illustration - RenĂ© Brantonne â et deux auteurs que j'apprĂ©ciais particuliĂšrement : J et D Le May. Brantonne je ne l'ai jamais revu, par contre je suis allĂ© quelques fois chez les Cauderon (J et D Le May) qui habitaient un petit immeuble moderne Ă cĂŽtĂ© de la Porte DorĂ©e. Il est probable â mais ce n'est pas une certitude, la mĂ©moire me fuit â que c'est moi qui demandais Ă Jean un texte pour Horizons du Fantastique, revue Ă laquelle je collaborais. Il s'agit de « Contrebande » repris par JM Archaimbault dans son ouvrage sur Interco. Ainsi donc, petit Ă petit, mes connaissances dans le monde de la SF s'enrichissaient de nouveaux personnages. L'un d'eux Ă©tait Jacqueline Osterrath. A l'origine j'avais interviewĂ© Jacqueline pour Nadir, mais une de ses dĂ©clarations avait mis en rogne une partie de l'Ă©quipe et compromis sa publication. Elle y dĂ©clarait en effet que « La BD Ă©tait une littĂ©rature pour analphabĂštes ». C'Ă©tait du Jacqueline tout crachĂ©. Elle m'ouvrit nĂ©anmoins les pages de son illustre fanzine « Lunatique » pour quelques critiques. Dommage que cet entretien ait Ă©tĂ© perdu, on n'en connait aucun autre de cette grande dame. Il faut dire, pour la petite histoire, que Jacqueline habitait ordinairement en Allemagne. Elle avait traduit les aventures de Perry Rhodan en France. Lorsqu'elle venait Ă Paris elle descendait chez sa mĂšre, rue Edmond Roger dans le 15Ăšme arrondissement et lĂ , coĂŻncidence, c'est moi qui entretenait son ascenseur...
Donc, aprÚs Nadir commença pour moi l'expérience « Axolotl », qui connut un numéro 0 et un numéro 1. Je fis aussi un autre essai avec « Kroofan », dont seule parut une unique livraison. Là encore, dans ce dernier fanzine, j'ambitionnais de publier en épisodes un roman de mon crû, roman dont j'avais envoyé l'unique exemplaire chez Opta. Je pense que le pauvre lecteur d'alors a dû bénir la poubelle de son bureau... Quoi qu'il en soit, recyclage oblige, la portion de roman ainsi sauvée et durement retraitée fut publiée, longtemps aprÚs, dans l'anthologie consacrée à Jimmy Guieu par Richard Nolane, sous forme d'une nouvelle intitulée « Cité Noé 51 ».
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