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Isidore Tiperanole et les trois lapins de Montceau-les-Mines | Pierre Thiry | 2011

Conte


Une fiche ajoutée dans nos cales par | 21/02/2012 | Lu 1686 fois





A cette époque, Montceau-les-Mines était bien différent d'aujourd'hui. — Oui, on sait déjà tout ça !!! répondrez-vous. C'était la campagne, il n'y avait personne à part quelques lapins, il ne se passait rien du tout... Ce n'est pas si simple, il se passait même bien des choses. Il y avait Arthur, Theobald et Justin, il y avait aussi la belle Ermelinde, il y avait encore... Isidore, il y avait enfin... Mais je ne vais pas vous raconter toute l'histoire maintenant, il faut aussi ouvrir le livre et lire Isidore Tiperanole et les trois lapins de Montceau-les-Mines alors vous apprendrez des choses qui vous étonneront peut-être. A cette époque, Montceau-les-Mines scintillait de poésie.

Fiche de lecture

Ce livre a été entièrement réalisé par Pierre Thiry, un écrivain amateur, et non par une maison d’édition professionnelle. C’est donc un petit ouvrage « fait maison ». Pierre Thiry aime écrire et partager ses textes, c’est un auteur proche de ses lecteurs. Il a d’ailleurs généreusement offert un bon nombre de ses livres à des connaissances. Après avoir bien apprécié son premier roman complètement déjanté, appelé « Ramsès au Pays des Points-virgules », j’étais curieuse de découvrir son second livre, qui est un conte pour enfants.
 
Lorsque je tiens ce petit livre entre mes mains, mon regard croche quelque peu sur un titre plutôt long et pas forcément évident à retenir : « Isidore Tiperanole et les trois lapins de Montceau-les-Mines ». Ensuite, il se pose sur la jolie illustration de couverture de Myriam Saci, un dessin aux couleurs vives qui contrastent fort bien avec le fond blanc. Au dos du livre, le résumé est original : Pierre Thiry interpelle le lecteur et titille sa curiosité.
 
Jadis, régnait à Montceau-les-Mines, une hermine plus belle que le jour... 
 
Pierre Thiry ouvre son récit à la manière d’un conteur. Ce plongeon dans un monde merveilleux me plaît tout de suite, car il rappelle à mon souvenir les contes qui ont bercés les soirées de mon enfance. Je me laisse donc emporter aux temps anciens, lorsque les êtres humains n’existaient pas encore et que les hermines régnaient en maîtres en ce monde…
 
Je lis à voix haute : le récit est fluide, ponctué ici et là d’humour et de poèmes. Ce texte est clairement destiné aux (petits) enfants : grands caractères d’imprimerie, onomatopées, illustrations et poésies enfantines (tous deux parfois un peu naïfs, dans le sens : simples).
 
Arrivée à la fin de cette lecture, je me pose quand même la question suivante : Est-ce que les enfants comprennent la morale de cette histoire sans quelques explications de la part d’un adulte ? En effet, la notion du temps qui s’écoule est perçue différemment par les adultes que par les enfants, et chez ces derniers, à mon avis, elle n’est pas vraiment une préoccupation, d’où mon interrogation.

Au sujet des personnages, pour ma part, il subsiste tout de même quelques petites incompréhensions/questions :

- Qu’est-ce que les frères Lapaimbot peuvent bien trouver à Ermelinde ?
Elle est si cruelle... et en plus, elle mange les lapins ! Elle n’a rien de sympathique. Donc, mis à part le fait qu’elle soit belle et riche, je ne vois pas ce qui peut les attirer chez elle. Bon, vous me direz que pour certains ce sont des arguments de poids, mais quand même...

- Pourquoi le coeur d’Ermelinde a-t-il chaviré pour Justin plutôt que pour l’un de ses deux autres frères ?
Le motif évoqué est que Justin a su prendre le temps de la conquérir, contrairement à ses frères. Pourtant, les deux autres lapins aussi ! N’est-il pas dit qu’ils ont tous les trois composés de nombreux poèmes pour elle ? Des jours et des nuits durant, ils ont attendu un signe de sa part, qui malheureusement n’est jamais arrivé à cause du méchant Isidore. Personnellement, je trouve que les trois lapins ont été plus que patients. De plus, l’amour a de cela, c’est qu’il est fougueux et passionné à ses débuts. C’est justement en temps qu’amoureux éperdus que Théobald et Arthur se rendent au palais pour conquérir le cœur de la princesse. Ces petits lapins sont vaillants, courageux et audacieux. Mais malheureusement pour eux, ils feront une rencontre malchanceuse... Justin suit d’ailleurs le même chemin qu’eux, sauf qu’il aura plus de chance, car Isidore ne sera pas là pour lui barrer la route, heureux concours de circonstance qui lui permettra d’approcher la princesse pour lui déclarer sa flamme de vive-voix. Aucun obstacle ne s’étant dressé devant lui, cela lui donne la possibilité de réciter l’un de ses poèmes à Ermelinde, qui succombera à son charme. Mais en quoi est-il plus méritant que ces deux autres frères, finalement ? Mise à part le fait qu’il a eu plus de chance qu’eux ?

Quant à Isidore Tiperanole, l’antagoniste de ce conte, il est – à mon sens - le personnage le plus intéressant de cette histoire. Isidore n’a qu’une idée en tête : tuer (physiquement) le temps à coups de tromblon. Pourquoi ? Parce qu’il a horreur de s’ennuyer ! Isidore se met donc martèle en tête d’attraper le temps afin de pouvoir l’étriper. Mais il n’y parvient pas, parce que le temps file trop vite. Petit à petit, il se rend compte à ses dépends que lorsque le temps file trop vite, c’est aussi un signe qu’on n’a pas le temps de s’ennuyer, et donc, qu’on n’a pas le besoin de tuer le temps. Et à trop vouloir se presser, on finit par en avoir la tête qui tourne. Si je comprends bien l’idée générale, je ne suis pas, par contre, très sûre de saisir le truchement d’événements (bout de chocolat, fable et valse dans le ciel) qui l’amènent à cette clairvoyance. Cependant, comme Pierre Thiry le dit très justement plus loin dans sa conclusion, rien ne sert de se précipiter : «Vouloir à tout prix tuer le temps, finit par être assommant. ».

J’en arrive maintenant aux illustrations de Myriam Saci. Les couleurs fortes qui s’en dégagent sont à l’image des explosions retentissantes du tromblon d’Isidore. Si les positions de certains personnages sont bizarres (membres qui forment des angles impossibles), et si certains traits sont illogiques (mouvements contradictoires), cela donnent aux dessins un air fantaisiste qui accompagnent bien le récit. Parmi les 6 dessins que Myriam Saci a fournis à Pierre Thiry, ce dernier en a coupé-copié-collé quelques parties par-ci par-là pour arriver à un total de 10 illustrations en tout, d’où la (fausse) impression de répétition.

En conclusion, je dirais de ce conte qu’il est plaisant et que c’est une invitation au pays de l’imaginaire, même si, personnellement, il manque le petit plus que j’avais découvert dans le premier roman de Pierre Thiry. Je recommande donc cet ouvrage tout particulièrement pour une lecture à voix haute, pour des enfants, qui, j’en suis sûre, l’apprécieront beaucoup.

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